La traque touchait à sa fin. Depuis des mois, le tueur à l’archer avait échappé à la task force créée spécifiquement pour le capturer. L’ampleur prise par l’enquête avait bien vite dépassé les capacités du commissariat du 97ème district. Les officiers du precinct avaient dû laisser les résultats de leurs investigations à ces types en costume venus de Quantico.

Mais Johnson avait réussi à faire partie des hommes et des femmes de terrain que le FBI avait incorporé dans l’équipe. Après tout, il était l’un des premiers à avoir poursuivi le tueur à l’archer quand on le vit pour la première fois, et le commissaire lui en devait une. Johnson n’aurait raté cette chance pour rien au monde : c’était pour lui l’occasion d’obtenir cette promotion tant attendue.

Et ce soir, enfin, le dénouement. Les indices obtenus par le FBI menaient tout droit à ce petit appartement de SoHo. Les feds encerclaient l’immeuble, et la descente allait commencer. Johnson raffermit sa prise sur la crosse de son calibre .40. Il était posté dans la ruelle derrière le bâtiment. Des coups de feu retentir dans la nuit pluvieuse, l’éclair de plusieurs détonations illumina un appartement du troisième étage.

Johnson aperçut une fenêtre à guillotine s’ouvrir et un homme se glisser à toute vitesse dans l’escalier de secours en métal avant de dévaler les marches quatre à quatre. Sans réfléchir, l’agent se précipita. Le fuyard sauta sur une benne à ordures et atterrit en roulant dans une flaque. Il tenait à la main un de ces archers dont il avait remplacé les cordes par une lame de scie sauteuse, et qu’il abandonnait à côté de ses victimes.

À l’étage, les fédéraux sommèrent l’homme de s’arrêter, mais devant son refus, ouvrirent à nouveau le feu. Johnson rentra la tête dans les épaules et accéléra la cadence. Le poids de son gilet pare-balles le gênait, mais l’adrénaline compensait. Plus que quelques pas, et il serait sur le tueur. Celui-ci entendit la charge lourde de Johnson et se retourna en lançant le bras en arrière. L’agent de police freina d’un coup sec et l’archer effleura juste son bras. Une giclée de sang se fondit dans les gouttes de pluie. La douleur fit lâcher son arme au flic, mais le meurtrier fut emporté par son élan et chuta. Johnson en profita pour lui sauter dessus et écraser sa main de tout son poids, bloquant ainsi la lame. L’homme se débattait, mais comprit bien vite qu’il était fait.

Les fédéraux descendaient l’escalier et rejoignirent Johnson et son prisonnier. D’autres agents arrivaient des rues en contrebas. Vernon, le chef de la task force, braqua son arme sur le tueur à l’archer.

— J’espère que t’as révisé ton solfège, mon gars. Parce que ce soir, tu finis au violon.

*

Johnson referma la portière du véhicule sur le suspect et se tourna vers l’agent du FBI :

— Chef, faut qu’j’vous dise… va vraiment falloir travailler vos punchlines.