— Tu sais ce que dit un Russe à son pote qui lui sert une vodka ?

Bertrand lança un regard furtif à Régis, mais reporta bien vite son attention sur la route. Il fronça les sourcils, s’attendant à une nouvelle blague nulle de son collègue :

— Non.
— Allez, cherche, répliqua l’homme en costume noir.
— Non.
— T’es nul, tu veux jamais jouer. En plus, tu fais un peu peur, à répondre comme ça.
— Ta gueule, Régis. On bosse, là.
— Bon, ok. Donc, je te donne la réponse. Donc le Russe, il dit à son pote : « T’as qu’à la chnikov ! »

Régis éclata de rire tandis que Bertrand leva légèrement le pied en tournant la tête, lugubre, vers celui qu’il appelait sans une once d’affection « l’autre abruti » auprès du reste de l’équipe.

— Putain, mais t’as conscience que ça veut rien dire ?!
— Ah bon ? Ah mais attends, je dois mal la raconter. Faut dire que le gars qui me l’a apprise, il me l’a sortie en russe, aussi, alors…
— Ta gueule.
— Bon, d’accord.

Le reste du chemin se déroula dans un silence sépulcral, les homme se préparant, chacun à leur manière, à faire leur office. Bertrand finit par garer la Lincoln devant un immeuble d’habitation. Ils descendirent et s’approchèrent du coffre, que Régis ouvrit. Ils contemplèrent l’attirail qui y logeait.

— Comme d’hab ? demanda le blagueur.
— Comme d’hab, répondit son morne acolyte.

Ils choisirent chacun leur engin favori et Régis se mit en direction de la ruelle qui contournait le bâtiment.

Bertrand le mit en joue et le suivit un instant dans sa ligne de mire, avant de baisser sa kalachnikov. Il ne pouvait pas se permettre cette lubie. Pas maintenant, en tout cas. Peut-être plus tard dans la soirée…